Par Jim W. Dean, le 15 décembre 2015
On nous a pris pour des andouilles dans l’arnaque du nucléaire iranien … sans jamais demander de preuves. Pas vrai ?
« Il y a de la beauté dans la vérité, même si elle est douloureuse. Ceux qui mentent déforment la réalité pour qu’elle paraisse savoureuse au paresseux, brillante à l’ignorant et puissante au faible. Mais les mensonges ne font que renforcer nos défauts. » - José N. Harris
Par Jim W. Dean, éditeur de VT … avec New Eastern Outlook, Moscou
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Qui va payer le prix pour nous avoir menti sur ceux qui ont soutenu l’EIIL ?
Le Ministre russe de la Défense a remporté « le prix de la semaine » en citant la description du « théâtre de l’absurde » que constitue le déni du Département d’Etat américain et du Pentagone qui ne savaient rien du soutien et de la complicité de la Turquie avec l’EIIL dans le gigantesque trafic de pétrole volé en provenance de Syrie.
Ils mentaient bien sûr, et ont avoué que la Turquie était coupable non seulement de trafic de pétrole mais de tous les autres trafics en tout genre traversant la frontière turque vers l’EIIL. L’envoyé spécial américain Amos Hochstein avait déclaré précédemment que la quantité de pétrole trafiquée vers la Turquie était insignifiante. Et ensuite le porte-parole de la coalition, le colonel Steve Warren, est allé encore plus loin en déclarant : « L’idée même que le gouvernement turc coopère d’une manière ou d’une autre avec l’EIIL est absurde et complètement fausse. »
Chaque service de renseignement et armée disposant d’une certaine capacité d’interception de communication et de moyens satellites importants ont pu observer ce manège depuis longtemps. Et quel chauffeur de taxi ne sait pas que rien ne se passe en Turquie sans que le renseignement turc ne soit au courant et n’en prélève une partie pour ses patrons ? Si l’EIIL posait un problème en Turquie, il ne tiendrait pas plus de 48 heures.
Comment tous ces « négationnistes du trafic de l’EIIL en occident » ont-ils réussi à camoufler l’arnaque aussi longtemps ? Les probabilités qu’ils soient, bêtes et incompétents ; ou qu’ils aient reçu l’ordre de mentir au monde et à leur peuple pour raisons politiques ; ou pour des raisons juridiques, afin d’éviter d’être accusés d’assistance et de complicité de crime contre l’humanité.
Ou … peut-être constituent-ils le véritable Axe du Mal, quelque chose que je ne dis pas à la légère, étant donné que la quantité de morts et de blessés, de tortures et d’exécutions d’êtres humains, et plus de dix millions de réfugiés ne fournissent guère matière à plaisanterie.
David Cameron parle de 70 000 combattants
de l’ASL (Armée Syrienne Libre) sans aucun
fondement – le magouilleur en chef.
Lorsque des gouvernements démocratiques répandent ce genre de mensonges pathologiques à ceux pour qui ils ont prêté serment de les protéger et de les défendre, est-il juste de les traiter de malveillants ?
Et lorsque le train du mal quitte la gare et que nous voyons plus de chefs d’état courir après lui, comme David Cameron en revendiquant que la Grande-Bretagne avait l’obligation de bombarder l’EIIL en Syrie pour contribuer à protéger les 70 000 combattants de l’Armée Syrienne Libre, n’est-ce pas de la manipulation malveillante à un certain niveau ?
Je n’oublie pas les Qataris et les Saoudiens, avec leur soutien indéfectible à leurs frères wahhabites qui sont devenus les Pères Fondateurs de l’Axe du Mal musulman. Eux bien sûr pensent qu’ils ne sont responsables devant personne, y compris Dieu, ce qui je pense est un mauvais choix de leur part et qu’ils vont regretter.
Mais rien de tout cela n’empêche leurs alliés occidentauxde se faire beaucoup d’argent en leur vendant d’énormes quantités d’armes pour se protéger des conséquences dont ils savent qu’ils auront à les subir. Avoir un grand frère nucléaire disposant non seulement de la Marine mais aussi de grandes capacités aériennes pour projeter sa puissance n’est pas seulement du luxe mais une nécessité lorsqu’on est un petit pays-sponsor du terrorisme.
Sur ce sujet, l’Iran et la Russie ont été pris la main dans le sac dans une certaine mesure. L’Iran avait tendu la main à tous les pays du Golfe en essayant d’améliorer ses relations sur des opportunités d’investissement dans l’espoir de relâcher les tensions et de saper les efforts continuels du Département d’Etat américain pour inscrire l’Iran sur la liste des états favorisant le terrorisme. En outre, l’Irak, l’Iran et la Russie ont été compromis par leurs liens financiers et commerciaux avec la Turquie.
Par exemple, dans le Nord de l’Irak la majorité des importations passent par la Turquie. Et durant les pires années de sanctions économiques contre l’Iran, la Turquie était une voie d’approvisionnement vitale. La Russie avait d’importantes relations commerciales, et des projets d’exportation de gaz et de construction d’oléoducs stratégiques en cours avec Ankara, cruciaux pour son économie. De tels enjeux géopolitiques ne peuvent être ignorés par des hommes d’état responsables.
Avion-radar AWACS saoudien – organiser des opérations illégales conjointes crée des occasions de chantage durables.
Mais tout cela a changé pour la Russie lorsquela Turquie a descendu le Su-24 au cours de ce qui est généralement reconnu comme une embuscade bien préparée, dans laquelle des avions AWACS de l’OTAN et de l’Arabie Saoudite sont suspectés d’avoir joué un rôle, ce qui ne fait qu’épaissir un peu plus la tambouille morale.
Lavrov a déclaré à des médias italiens le 9 décembre que la Russie avait préalablement eu connaissance du trafic de l’EIIL qui passait par le territoire turc, et avait eu de longues discussions à ce sujet avec … « nos partenaires turcs sans faire de l’esbroufe en les accusant de quoi que ce soit … nous étions réticents à croire que (les dirigeants turcs étaient impliqués) et avons essayé d’aborder ces problèmes à travers des canaux particuliers. Cela n’a pas marché. »
Vous remarquerez que les Etats-Unis ont reconnu avoir eu connaissance du trafic pétrolier entre la Turquie et l’EIIL le jour suivant. Lavrov les avait poussés à sortir du bois avec cette concession le jour précédent.
Après des décennies d’expérience du combat,
qui peut croire que les Kurdes sont incapables
d’entraîner leurs propres troupes ?
Mais le théâtre de l’absurde a atteint un niveau supplémentaire avec l’avancée de troupes de la Turquie-OTAN dans la région pétrolière de l’Irak. On a laissé filtrer différentes versions de l’histoire dans différents médias pour créer la confusion qui ferait en sorte que le public se désintéresserait rapidement de la question.
Les sources de VT ont confirmé que 150 hommes étaient une fumisterie et que le véritable chiffre était de 1 500, et que les troupes et les chars avaient été là-bas depuis un certain temps dans différents endroits. Il est évident que l’Irak ne voulait pas admettre qu’il ne l’avait jamais évoqué auparavant.
Une partie de la révélation médiatique de cette nouvelle tentative de déstabilisation de l’Axe du Mal est venue des Butch Cassidy et Sundance Kid du Sénat américain.
John McCain et Lindsey Graham ont demandé à ce que 10 000 soldats américains soient envoyés à la frontière syro-irakienne en tant que « gardiens », et puis on a parlé de 90 000 soldats supplémentaires du Golfe pour protéger les frontières … dix divisions, sans compter les Turcs, pour envoyer un message à Bagdad et dire au revoir à la province d’Anbar, destinée à être « sous surveillance » pour un bon bout de temps.
A Veterans Today, nous avons longtemps indiquéque sans davantage de pression internationale contre ces campagnes militaires illégales à l’intérieur d’un autre pays sans sa permission, elles ne feraient que prendre de l’ampleur pour devenir des forces d’occupation permanentes sous prétexte d’une lutte antiterroriste.
Cela ressemble maintenant à un jeu est-ouest de savoir jusqu’où ne pas aller trop loin, et jusqu’ici les protestations ont été faibles, mais ne sont heureusement pas passées inaperçues.
La chancelière allemande Angela Merkel est
sur la corde raide sur ce sujet
L’Allemagne a refusé de partager du renseignement avec la Turquie parce qu’elle est un partenaire indigne de confiance, un affront majeur après que Merkel ait fait passer une aide de 3 milliards d’€ à la Turquie au titre de l’aide aux réfugiés.
Le Président de la République Tchèque, Melos Zelman, déclare : "Malgré que la Turquie soit un état membre de l’OTAN, elle ne devrait jamais devenir un membre de l’UE parce qu’elle « se conduit parfois comme si elle était un allié de l’Etat Islamique. »
Willy Wimmer, l’ancien secrétaire d’état allemand à la Défense, a déclaré qu’Ankara n’était « pas en mesure » d’entraîner l’OTAN dans la guerre, en soulignant que le bloc militaire serait bien mieux loti sans la Turquie.
Nous assistons également à des réticences croissantes à renouveler les sanctions de l’Union Européenne contre la Russie, que les Etats-Unis et l’OTAN veulent imposer pour six mois supplémentaires. L’ancien ministre français des transports et actuel député des Français de l’étranger, Thierry Mariani, a présenté une résolution au Parlement appelant à la levée des sanctions contre la Russie en raison des dommages économiques provoqués aux deux pays. L’Italie a demandé qu’une extension des sanctions fasse l’objet d’une discussion préalable.
De retour aux Etats-Unis, nous avons eu également droit à quelques surprises. Le cinglé de service candidat à la course républicaine pour la présidentielle, Ted Cruz a plaidé pour un bombardement nucléaire de l’EIIL. Ecoutez à quel point les dirigeants politiques des Etats-Unis sont tombés bien bas :
« Nous allons finir par détruire l’EIIL. Nous allons les écraser sous un tapis de bombes jusqu’à ce qu’ils disparaissent dans le néant. Je ne sais pas si le sable peut rougir dans l’obscurité, mais nous allons le découvrir », a déclaré Cruz selon la citation parue dans le Des Moines Register. Des choses pareilles ne s’inventent pas.
Heureusement, le nouveau Président des Chefs d’état-major, le général d’aviation Paul Selva, a rejeté la suggestion de Cruz. Il a rétorqué en disant « … l’armée américaine n’est pas en train, et ne s’engagera pas à l’avenir, dans des bombardements massifs. »
Même Donald Trump s’est pris une claquedu Pentagone pour sa remarque stupide appelant à empêcher tous les Musulmans d’entrer dans le pays, en disant que cela ne ferait que contribuer au recrutement de Daesh pour sa guerre sainte.
Pourrions-nous qualifier un jour Ted Cruz de
« cinglé en chef » ?
L’Irak a besoin d’agir de façon cohérente. Nous avons entendu parler d’un ultimatum adressé aux Turcs et toutes les options sont sur la table, ensuite cela passera au Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Ensuite nous entendons parler d’une requête adressée aux Russes pour établir une base aérienne, et ensuite que Bagdad veut « s’arranger » avec la Turquie. Alors que je rédige cet article, l’Irak affirme qu’elle veut demander aux Nations Unies de faire sortir la Turquie du pays. Qui sait ce qu’ils vont dire demain ?
Erdogan a réagi à cet ultimatum de quitter ce pays en disant, que diable non, il ne va pas partir, il mène une campagne antiterroriste pour la coalition américaine, qui n’est en fait sur le flanc nord pour tenter de séparer les Kurdes et la province d’Anbar de l’Irak par le biais d’une occupation permanente.
Je vois ces manœuvres comme une tentative d’appâter la Russie et l’Iran dans une guerre plus large pour empêcher la coalition de l’OTAN-Pays du Golfe-Israël de redessiner la Syrie et l’Irak à leur façon ; pour faire leurs tracés d’oléoduc à coup de fusil. La politique coloniale diplomatique de la canonnière est malheureusement de nouveau à la mode.
Traduction française : Patrick T rev Isabelle